La Tunisie, comme de nombreuses régions du monde, fait face à une sécheresse persistante aggravée par le réchauffement climatique. Avec une disponibilité en eau douce par habitant et par an ne dépassant pas les 400 m3, le pays est confronté à des défis majeurs en matière d’approvisionnement en eau, notamment pour l’agriculture, secteur essentiel de son économie.
Le changement climatique a entraîné des événements météorologiques extrêmes, avec des pluies torrentielles dans certaines régions et des périodes prolongées de sécheresse dans d’autres. Face à cette crise, le ministère de l’Agriculture, des Ressources hydrauliques et de la Pêche a mis en place diverses mesures, allant du rationnement de l’eau potable à l’interdiction de certaines cultures dans les périmètres publics irrigués. Cependant, ces mesures se heurtent à leurs limites et ne répondent pas complètement aux besoins croissants, en particulier pour les agriculteurs.
Dans ce contexte, une idée émerge : utiliser l’eau de mer pour l’irrigation. Si cette pratique est déjà courante dans certains pays du Golfe, elle pourrait être une solution novatrice pour la Tunisie, qui dispose de 1300 km de côtes en bordure de la Méditerranée indique Ridha Bergaoui sur Leaders.tn.
Le dessalement de l’eau de mer, bien que coûteux, est une pratique éprouvée dans des pays comme l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis, la Jordanie, l’Égypte, Oman et le Maroc. Deux techniques prédominent : l’évaporation suivie de la condensation et l’osmose inverse, cette dernière étant moins onéreuse bien que générant une saumure concentrée potentiellement polluante.
L’utilisation de l’énergie solaire photovoltaïque pour le dessalement pourrait contribuer à réduire les coûts et à rendre cette pratique plus durable sur le plan environnemental. Un projet pilote de dessalement à l’énergie solaire a déjà été réalisé avec succès à la ferme El Béji, dans le gouvernorat de Gabès, irriguant des cultures sous serre.
Des études ont montré que des halophytes comme la Suaeda fruticosa et la Spartina alterniflora peuvent être irriguées avec de l’eau de mer
Cependant, la désalinisation de l’eau de mer est principalement utilisée pour la production d’eau potable, en raison de son coût élevé. L’idée d’irriguer les cultures avec de l’eau de mer, sans la dessaler, pourrait être une solution plus économique. Cependant, cela soulève des défis liés à la tolérance des plantes au sel.
L’expert explique que certaines espèces de plantes, appelées halophytes, peuvent survivre dans des milieux riches en sel. Des études ont montré que des halophytes comme la Suaeda fruticosa et la Spartina alterniflora peuvent être irriguées avec de l’eau de mer diluée et enrichie en azote et en phosphore, produisant des rendements intéressants.
Cependant, la plupart des cultures traditionnelles ne tolèrent pas des niveaux élevés de sel dans le sol ou l’eau, ce qui peut entraîner une déshydratation des plantes et une diminution des rendements.
Des recherches sont en cours pour développer des variétés de cultures résistantes au sel. Des progrès significatifs sont attendus dans un proche avenir, avec la possibilité de cultiver des cultures de base telles que le blé, le riz et le maïs à l’eau de mer.
Il est crucial de souligner que l’utilisation d’eau salée entraîne l’accumulation de sel dans le sol, conduisant à sa dégradation. Des mesures comme l’apport d’amendements calcaires et de matière organique peuvent aider à prévenir cette dégradation et à maintenir la fertilité du sol.
Dans un contexte où chaque goutte d’eau compte, il est impératif d’explorer toutes les options possibles pour garantir la sécurité alimentaire et répondre aux besoins croissants en eau précise la même source. Des projets fédérateurs regroupant les laboratoires de recherche et concentrant les ressources nécessaires pour étudier les différents aspects de l’utilisation de l’eau salée pourraient être la clé pour trouver des solutions durables à la crise hydrique qui sévit en Tunisie. La recherche scientifique, avec son potentiel innovant, pourrait bien être la réponse nécessaire pour assurer un avenir alimentaire et hydrique stable dans le pays.